Né le 29 juillet 1899 à Françay (Loir-et-Cher), Roger Aurélien Deniau, employé, membre de la SFIO parisienne depuis 1931, est un actif militant de la fédération des employés CGT confédéré dès avant la fusion syndicale de 1936, proche d'Oreste Capocci et d'Albert Gazier. Il ne semble cependant pas avoir occupé de responsabilités de premier plan avant 1939. En effet, il ne figure pas sur la liste des candidats au renouvellement de la direction du syndicat en 1938. Pourtant, le conseil d'administration du 6 octobre 1940 le confirme dans ses fonctions de secrétaire de la Chambre syndicale des employés de la Région parisienne, en même temps que Gazier. Cela signifie probablement qu'il a accédé à la direction syndicale après l'éviction des anciens unitaires. Dans le combat que livrent aux partisans de la Charte du travail les résistants - très présents parmi les employés comme Gazier et Capocci, deux des douze signataires du "Manifeste du syndicalisme libre"-, Deniau se range résolument dans les rangs des seconds. Ceux-ci ayant choisi de pratiquer une politique de "présence" en même temps qu'ils organisent la Résistance, Deniau est chargé par la chambre syndicale, sous l'égide du ministère de la Jeunesse, de mettre en place un centre de commerce, dans lequel ils reçoivent une solide éducation professionnelle. Le centre comprend cent cinquante jeunes, occupés toute la journée, bénéficiant d'avantages matériels (indemnités et un repas par jour).
Dans le même temps, à côté de cette action syndicale légale, il est l'un des chefs de Libération-Nord sur la Région parisienne, l'organisant en cellules clandestines et se spécialisant dans le renseignement économique. Il entre à la direction nationale du mouvement au début 1943, après le départ de Pineau et Cavaillès. Cette action est profondément imbriquée avec la reconstruction du mouvement socialiste clandestin. Membre du Comité d'action socialiste, il diffuse autant Le Populaire clandestin que les journaux syndicaux et Libération. Il entre par ailleurs au bureau clandestin de la CGT. Au titre de Libération-Nord, Deniau est délégué au Comité parisien de libération ; il est désigné à la vice-présidence de cet organisme clandestin. Mais l'ancien confédéré affronte -sans concessions- les frères ennemis communistes. Léo Hamon écrit à son propos : "Les heurts avec ses partenaires communistes étaient fréquents. Leur opposition s'était si banalisée qu'elle ne laissait plus place à l'imprévu". Les rapports se tendent encore après le 6 juin 1944, lorsque la question de l'insurrection est posée. Avec Léo Hamon et Marie-Hélène Lefaucheux, il s'oppose activement à l'appel à l'insurrection jusqu'au 19 août.
La Libération voit Deniau cumuler les fonctions. Il est tout d'abord désigné au Comité parisien de libération, qui lui attribue la fonction de commissaire au Ravitaillement de la Région parisienne, et député à l'Assemblée consultative provisoire au nom de la CGT. Dans l'ACP, il est secrétaire de la Commission des Affaires étrangères, appartient à la commission de la France d'Outre-Mer et à la commission de coordination des Affaires musulmanes. Il est ensuite élu maire de Puteaux, conseiller général de la ville et vice-président de l'Assemblée départementale de la Seine en avril 1945. Il renforce cet enracinement en assurant la direction de l'hebdomadaire Paris-Ouest. Enfin, il est l'un des secrétaires de la CGT en 1945-1946. À l'élection à la deuxième Constituante en juin 1946, la SFIO présente sa candidature dans le 5e secteur de la Seine sur une liste conduite par son camarade Albert Gazier. Réélu en juin, Deniau est battu aux élections législatives de novembre 1946 et à celles du Conseil de la République en novembre 1946.
Deniau s'est progressivement intéressé à l'Union française. Membre des commissions parlementaires, il a été rapporteur de plusieurs textes importants, notamment sur la participation des colonisés aux élections parlementaires. Il est entré au cabinet de Marius Moutet, ministre de la France d'Outre-Mer dans le cabinet de Ramadier, après avoir été battu aux élections. En 1958, on le retrouve installé à Dakar, où il fait le lien entre les socialistes africains, qui ont obtenu leur autonomie politique, et la direction de la SFIO.
De retour en France, installé en Dordogne, il est élu conseiller municipal de Trélissac en 1965. L'année suivante, il figure comme responsable de la fédération de la Gauche européenne du département et est représentant des Clubs à la fédération de la Gauche démocratique et socialiste de la Dordogne. Il meurt le 14 mai 1971 à Trélissac (Dordogne).
Il était médaillé de la Résistance avec rosette.
Source : Gilles Morin, "Roger Deniau" in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004.